lundi 18 juillet 2011

:: Le fondement réel de l’histoire

« Qu'est-ce que la société, quelle que soit sa forme ? Le produit de l'action réciproque des hommes. Les hommes sont-ils libres de choisir telle ou telle forme sociale ? Pas du tout. Posez un certain état de développement des facultés productives des hommes et vous aurez une telle forme de commerce et de consommation. Posez de certains degrés de développement de la production, du commerce, de la consommation, et vous aurez telle forme de constitution sociale, telle organisation de famille, des ordres ou des classes, en un mot telle société civile. Posez telle société civile, et vous aurez tel État politique, qui n'est que l'expression officielle de la société civile. (...) : Il n'est pas nécessaire d'ajouter que les hommes ne sont pas libres arbitres de leurs forces productives - qui sont la base de toute leur histoire - car toute force productive est une force acquise, le produit d'une activité antérieure. Ainsi les forces productives sont le résultat de l'énergie pratique des hommes, mais cette énergie elle-même est circonscrite par les conditions dans lesquelles les hommes se trouvent placés, par les forces productives déjà acquises, par la forme sociale qui existe avant eux, qu'ils ne créent pas, qui est la production de la génération antérieure. (...) Les hommes ne renoncent jamais à ce qu'ils ont gagné, mais cela ne vient pas à dire qu'ils ne renoncent jamais à la forme sociale, dans laquelle ils ont acquis certaines forces productives. Tout au contraire. Pour ne pas être privé du résultat obtenu, pour ne pas perdre les fruits de la civilisation, les hommes sont forcés, du moment où le mode de leur commerce ne correspond plus aux forces productives acquises, de changer toutes leurs formes sociales traditionnelles. (...) Ainsi les formes économiques sous lesquelles les hommes produisent, consomment, échangent, sont transitoires et historiques. Avec de nouvelles facultés productives acquises, les hommes changent leur mode de production, et avec leur mode de production, ils changent tous les rapports économiques qui n'ont été que les relations nécessaires de ce mode de production déterminé

[Marx, K.,, Lettre à Paul Annenkov, 26 décembre 1846]

« Les hommes produisent donc leur histoire, mais ils ne la produisent pas n’importe comment, ils la produisent sur la base de leur production sociale, c'est-à-dire d’un acquis, d’une continuité contradictoire. L’humanité rencontre ainsi à chaque stade un résultat matériel, une somme de forces productives, un rapport historique des hommes avec la nature et entre eux, qui sont transmis à chaque génération par celle qui la précède, une masse de forces productives, de capitaux, de circonstances qui, d’une part est modifiée par la nouvelle génération, mais qui d’autre part lui assigne ses conditions propres d’existence et lui donne un développement déterminé, un caractère spécial. Tel est le fondement réel de l’histoire, ce qui lui donne une essence objectivement dialectique. C’est pourquoi, comme dit Marx, les hommes ne font pas leur histoire librement « dans des conditions choisies par eux, mais dans des conditions directement données, léguées par la tradition », dont l’essentiel est la puissance productive »
[Bröhm, J.-M., préface de Jakubowsky, F., Superstructures idéologique et conception matérialiste, 1971]

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