vendredi 2 décembre 2011

:: Côte d'Ivoire - Alassane Ouattara, quelques rappels


"Le succès de ces reformes [d'ajustement], écrivait la Banque Mondiale, suppose une transformation radicale du rôle de l'Etat, qui n'ira pas sans difficultés dans le contexte africain, caractérisé par la faiblesse des institutions et, souvent, par une très vive résistance politique" [1]. Or, en Côte d’Ivoire, c’est non sans un certain zèle que les dirigeants ivoiriens vont répondre aux exigences de la Banque mondiale. C’est par exemple le cas d’Alassane Ouattara victime plus tard du prisme ethnique attisé par ses concurrents. Technocrate réputé brillant, gouverneur de la BCEAO (Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest) et ancien conseiller spécial du directeur général du Fonds monétaire international (FMI), nommé en 1990 premier ministre et ministre de l'économie et des finances, il veut faire de la Côte d’Ivoire un "bon élève". Libéral convaincu, il n’a de cesse, d’une part, de perfectionner le fonctionnement du capitalisme ivoirien pour rassurer les bailleurs de fond – il prend notamment des mesures d’austérité contre la population en réduisant les budgets sociaux et lance un programme de privatisation en cédant notamment la distribution de l'électricité à une filiale de Bouygues – et, ce faisant, va contribuer à accroître la détresse sociale de la population [2].
Ouattara s’est également employé à réprimer les manifestations que les difficultés économiques croissantes ont entraînées. Il est ainsi en fonction – en tant que chef du gouvernement – quand il couvre le chef d’état-major Robert Gueï responsable d’une violente expédition punitive à la cité universitaire de Yopougon, dans la banlieue d'Abidjan, durant laquelle deux lycéennes et une étudiante sont violées et la plupart des étudiants soumis à un traitement barbare. C’est lui encore qui, en février 1992, fait arrêter au moins cent trois personnes – dont Laurent Gbagbo – à la suite d'une manifestation ayant dégénéré en émeute.

Et c’est également lui, toujours premier ministre de Houphouët-Boigny, qui va décider de l’instauration de la carte d’identité nationale infalsifiable dans le but avoué de distinguer les Ivoiriens des "non-Ivoiriens" et qui, dans le même temps, instaure la carte de séjour pour les étrangers dans le but, implicite cette fois, de renflouer les caisses de l’Etat. Cette décision aura des conséquences sur le long terme : la police, en quête des individus dont le nom à une consonance nordiste, multiplie les rafles ; des mosquées sont même parfois incendiées. "La carte de séjour, explique Ousmane Dembele, organise une fracture sociale où les gens du Nord, quels qu’ils soient, apparaissent en dernière instance comme des parias par rapport aux autochtones du Sud" (Ousmane Dembele, "Côte d’Ivoire, la fracture communautaire", in Politique africaine, n°89). Autant dire que cet homme d’Etat a fortement contribué à attiser les braises sur lesquelles viendront bientôt s’épanouir la propagande et la violence ethniste. D’autant que, par la suite, pour combattre le pouvoir, il ne se privera pas – à l’instar de Laurent Gbagbo au nom des Bétés – de faire sien, ouvertement, l’argument ethniste : il fera notamment de la défense des Dioulas le mot d’ordre de son nouveau parti, le RDR (fruit d’une scission du PDCI en raison de sa rivalité avec Bédié).


[1] Banque Mondiale, L’ajustement en Afrique : réformes, résultats et le chemin à parcourir, 1994, pp. 257-258 (cité par Bonnie CAMPBELL, "Le modèle ivoirien de développement à l’épreuve de la crise", Bernard CONTAMIN, Harris MEMEL-FOTÊ, Le modèle ivoirien en questions. Crises, ajustements, recompositions, Paris, Karthala, 1997, p. 52).
[2] A la mort de Félix Houphouët-Boigny, il reprend sa place de haut fonctionnaire international en qualité de directeur général-adjoint du FMI, l’institution internationale qui en juillet 1992, avait refusé à la Côte d'Ivoire l’octroi d’un crédit de 120 millions de dollars, gelant ainsi son "programme en faveur de la Côte d'Ivoire"

:: Le communisme, seul avenir de la société


C’est en prévision de telles crises qu’il est vital que se maintienne un courant communiste.
C’est en prévision de ces périodes qu’il est important que ces courants ne se dissolvent pas dans l’atmosphère délétère de la réaction, de l’individualisme triomphant.
Et, c’est peut-être là, dans les pays riches comme le nôtre, où se pose véritablement le problème. Car le capitalisme, ce n’est pas seulement l’exploitation et la misère matérielle. C’est aussi la pourriture sociale. Cette société ne diffuse pas le sens de l’intérêt collectif en son sein, elle le démolit. Elle ne propose comme seule valeur à tout un chacun, en guise de morale universelle, que la morale de l’argent à se faire. C’est une société à irresponsabilité illimitée. Et, même parmi ceux qui n’ont aucune, mais vraiment aucune chance de s’en sortir individuellement, c'est-à-dire l’écrasante majorité des ouvriers et des employés, on veut diffuser l’idée que l’ascension individuelle est la seule ascension possible et que, hors de là, point de salut.
Jamais dans l’histoire sociale, les hommes n’ont été plus dépendants les uns des autres qu’aujourd’hui, à une époque où, dans les pays développés, plus personne n’est capable de produire pour son seul usage personnel, et où chacun est dépendant des autres.
Mais jamais la société n’a autant nié cette dépendance. Jamais société n’a autant isolé les gens les uns des autres, entassés qu’ils sont pourtant dans les mêmes cages d’escalier, dans les mêmes transports.
Toute  la formidable machine de décervelage de la bourgeoisie, des médias aux politiciens, en passant par de prétendus intellectuels, vise à convaincre les travailleurs, privés en réalité par le système capitaliste de propriété et de droits, qu’ils ont la propriété, qu’ils ont des droits à défendre, et non pas contre les bourgeois mais contre d’autres travailleurs, d’autres corporations, d’autres nationalités.
C’est en insufflant l’idée qu’ils ont des intérêts privés ou catégoriels à défendre qu’on cherche à faire oublier aux travailleurs que leurs intérêts collectifs ont une tout autre importance.
La bourgeoisie, et ses idéologues, et ses médias, parviennent d’autant plus facilement à diffuser ces idées que les grandes organisations réformistes de la classe ouvrière, syndicales et politiques, ne véhiculent plus ces valeurs propres au mouvement ouvrier, quand elles ne véhiculent pas ouvertement l’idéologie de la bourgeoisie, l’attachement à « notre » entreprise, à « notre » économie, à « notre » patrie par exemple.
Mais il y a toujours eu, dans la classe ouvrière, des militants pour défendre les idées du mouvement ouvrier, celle de l’identité des intérêts fondamentaux des travailleurs, quelles que soient leur race, leur nationalité ; celle de leur solidarité de classe face à leurs exploiteurs ; celle de la nécessité de libérer la classe ouvrière des chaines de l’exploitation capitaliste ; celle du collectivisme.
Voilà pourquoi des communistes se sont battus, ont milité dans les pays du monde depuis 70 ans, en prenant la succession des militants communistes qui ont, parmi les premiers, denoncé le stalinisme, c'est-à-dire les militants trotskistes, je suis fière aussi d’appartenir à l’ensemble du mouvement communiste.
Tant qu’il y aura un seul militant pour relever ce drapeau où que ce soit dans le monde, nous pouvons être certains que le communisme restera l’avenir.
Le communisme est la seule idée progressiste de notre temps. Voilà pourquoi l’avenir lui  appartient, car c’est le seul avenir possible pour notre planète.

Extrait de l'intervention d'Arlette Laguiller du vendredi 14 février 1992 à la Mutualité : "Le communisme est toujours l'avenir du monde !"

Lire les autres extraits de l'intervention :

:: La capacité du prolétariat à prendre la direction de la société #4

:: L'avenir communiste #3

:: La bourgeoisie capitaliste, une classe parasitaire #2

:: Le remplacement de l'économie capitaliste, une nécessité inscrite dans son propre développement #1