mercredi 19 septembre 2012

:: Gagner la base ouvrière du PCF à une véritable politique communiste et révolutionnaire [LO, 1986]


[...] Du côté de la bourgeoisie, de son système politique et de ses jeux électoraux, les perspectives du Parti Communiste sont aujourd’hui passablement bouchées. Mais cette position d’éternel opposant, au contraire de ce qu’en disent ou en pensent tous les commentateurs qui enterrent le Parti Communiste trois fois par semaine, et tous les réformateurs - pour qui le défaut du Parti Communiste, c’est de ne pas être le Parti Socialiste - n’est cependant pas nécessairement un handicap dans la classe ouvrière. A certains égards, au contraire, cela accrédite l’idée que le Parti Communiste est un adversaire radical de la société bourgeoise, plus radical en tout cas que le Parti Socialiste.
Et la politique que mène la direction du Parti Communiste français par exemple avec son attitude toute récente de critique systématique du Parti Socialiste, avec ses tentatives d’actions spectaculaires dans la classe ouvrière, chez Renault ou ailleurs, c’est précisément de reconquérir cette image de défenseur intransigeant de la classe ouvrière que sa participation gouvernementale a sérieusement ternie.
Il faut que les révolutionnaires connaissent bien la nature et les mécanismes des liens qui unissent le Parti Communiste à la classe ouvrière et qui ne sont certainement pas que des liens électoraux. Sur le plan électoral, le recul du Parti Communiste français est patent. C’est ce recul qui a amené sa direction à quitter le gouvernement pour adopter une attitude plus critique à l’égard du Parti Socialiste. Mais c’est aussi ce recul qui a poussé un certain nombre de cadres, de responsables, de notables du Parti Communiste à se faire les porte-parole de l’attitude inverse, plus ouvertement réformiste, impatiente d’officialiser une politique d’alignement derrière le Parti Socialiste, que la direction a cessé momentanément de prôner.
Bien sûr, la lutte plus ou moins feutrée que cela entraîne dans l’appareil du Parti et parmi ses dirigeants peut pousser les travailleurs communistes du rang à se poser des questions et peut-être à leur trouver des réponses qui ne vont ni dans le sens de Marchais, ni dans le sens de Juquin.
Il faut être attentif à cela. Il faut en tout cas discuter avec les travailleurs communistes, de quelque obédience qu’ils soient, pour peu qu’ils acceptent de discuter politique, pour peu qu’ils acceptent de se demander comment et avec quelle politique le mouvement ouvrier de demain pourrait, en cas de remontée de la combativité, éviter d’en arriver de nouveau à la situation de recul et de démoralisation présents.
Mais force est de constater que, jusqu’à maintenant, on n’a vu apparaître dans cette discussion aucun courant, fut-il minuscule, prônant au sein du Parti Communiste un retour aux traditions de lutte de classe, aux véritables traditions communistes.
Et, dans ces conditions, du débat entre rénovateurs et partisans de la direction actuelle, ne peut sortir rien de bon pour les travailleurs, à supposer que débat il y ait. Juquin et les autres chefs de file actuels des rénovateurs ne représentent pas une politique plus juste, du point de vue des intérêts de la classe ouvrière, que Marchais. La politique de Marchais, qui a conduit le Parti Communiste à la situation où il est, était d’ailleurs la leur. Et il n’y a aucun automatisme qui puisse donner à cette discussion une dynamique conduisant à des positions de lutte de classe : il faudrait pour cela que des hommes, des militants, choisissent consciemment et clairement, au sein du Parti Communiste, une telle politique.
Le recul du Parti Communiste lui-même ne résulte pas d’une montée ouvrière qui aurait débordé la politique du Parti Communiste sur la gauche. Il se fait, au contraire, dans une période de démoralisation de la classe ouvrière et il en est, dans une certaine mesure, l’expression.
Mais c’est dans la perspective d’une nouvelle remontée de la combativité de la classe ouvrière que les révolutionnaires doivent bien connaître le Parti Communiste et bien connaître ses militants. Parce que, en tant que révolutionnaires, nous serons inévitablement, nécessairement, en compétition avec le Parti Communiste, sur la question de savoir dans quelles perspectives politiques s’orientera cette remontée.
En raison de sa situation spéciale, c’est probablement au Parti Communiste que profitera, dans un premier temps, toute remontée ouvrière. Et il faudra que les révolutionnaires soient préparés à lutter politiquement pour disputer cette influence du Parti Communiste.
C’est pourquoi il faudra que les révolutionnaires soient capables de profiter de la période de recul présente pour s’implanter dans un grand nombre d’entreprises ; et qu’ils y aient des militants aussi dévoués que ceux du Parti Communiste. C’est le préalable à tout développement. Mais cela étant, il faut qu’ils soient conscients que, même s’il se produit une remontée, les révolutionnaires resteront nécessairement minoritaires pendant un temps. Il faut qu’ils sachent alors à la fois se soumettre à des majorités qui seront influencées par le Parti Communiste et ses militants, et à la fois défendre ouvertement, clairement, publiquement leur propre politique devant les travailleurs. Et il faudra qu’ils montrent toujours, concrètement, en quoi la politique qu’ils proposent est différente de celle du Parti Communiste.
Enfin, tout en acceptant d’être minoritaires, il faudra que les révolutionnaires se battent pour que les travailleurs se donnent des structures démocratiques pour diriger leurs luttes.
Car même si ces structures démocratiques elles-mêmes refléteront sans doute, dans un premier temps, l’influence du Parti Communiste, c’est uniquement si les travailleurs ont la possibilité de comparer les politiques, de les juger et de trancher, qu’ils pourront dans la dynamique du mouvement dépasser le stade où ils se sentiront représentés par le Parti Communiste. Car le Parti Communiste trahira leurs luttes, à une étape ou à une autre, inévitablement.
Nous disons cela sans aucun esprit d’hostilité vis-à-vis des travailleurs communistes, bien au contraire. Car les travailleurs communistes sont, tout comme les autres travailleurs et peut-être à certains égards, plus que les autres, trahis par la direction et l’appareil de leur parti, qui utilise leur énergie militante mais la canalise finalement toujours au profit du système bourgeois.
Certains de ces militants communistes, même ceux de la classe ouvrière, parce que ce sont ceux-là qui nous importent, sont peut-être définitivement perdus pour la révolution, déformés et corrompus qu’ils ont été par leur parti et par sa politique.
Mais il y a les autres, et même s’ils ne constituent qu’une minorité dans le Parti Communiste, de toutes façons ils représentent dans les entreprises une force numérique et militante supérieure à celle des révolutionnaires.
Et puis, il y a aussi les jeunes, ceux que la simple existence et l’activité militante des précédents attirent en permanence vers l’activité militante.
Mais il n’y aura de véritable parti révolutionnaire, en France comme en Italie, comme ailleurs, que lorsque ces travailleurs communistes, ces militants actuels ou potentiels du Parti Communiste, renoueront avec les idées véritablement communistes, véritablement révolutionnaires. Il n’y aura de véritable Parti Communiste que lorsqu’ils éprouveront le besoin de s’organiser sur la base des idées communistes en se séparant des partis qui portent encore ce nom mais qui, eux, sont définitivement passés, et depuis longtemps, dans le camp de la bourgeoisie.

:: Le véritable changement ne viendra que de la lutte des travailleurs


Préparer les luttes à venir du monde du travail

Les élections passées, les promesses de changement font place à la réalité. Les plans de licenciements ne prennent pas de vacances. Des dizaines de milliers de suppressions d’emplois ont déjà été annoncées dans de grandes entreprises : PSA, Air France, Sanofi, la téléphonie, Doux, etc. Et combien vont suivre, parmi les sous- traitants ou dans les plus petites entreprises qui en dépendent ? Pour les travailleurs et leurs familles, qui n’ont que leur salaire pour vivre, c’est une catastrophe.

Face à cette cascade de plans dits sociaux, le gouvernement a montré qu’il n’entendait pas contraindre les patrons. Certes, Hollande a bien affirmé qu’il n’acceptait pas « en l’état » le plan de 8 000 suppressions d’emplois chez PSA qui prévoit la fermeture de l’usine d’Aulnay-sous-Bois, mais il y a fort à parier qu’il l’acceptera pour peu que le groupe fasse quelques retouches, qui ne changeront rien au sort des ouvriers mis sur le carreau. Et il a surtout parlé « d’aider la filière automobile », ce qui revient à distribuer l’argent public à des groupes qui ont engrangé des milliards de bénéfices les années passées, sans pour autant garantir l’emploi.

Le véritable changement ne viendra que des luttes des travailleurs

S’ils veulent ne pas continuer à être les victimes d’une crise dont ils ne sont pas responsables, les travailleurs ne peuvent pas compter sur ce gouvernement. Ils doivent montrer leur force, pour imposer au patronat l’interdiction des licenciements, et des hausses de salaires qui leur permettent d’envisager l’avenir sans crainte.Pendant les campagnes électorales, les militants de Lutte Ouvrière ont défendu avec Nathalie Arthaud un programme pour les luttes à venir du monde du travail :

  • Interdiction des licenciements et répartition du travail entre tous sans baisse de salaire ;
  • Augmentation des salaires, pensions et allocations ;
  • Échelle mobile des salaires : quand les prix augmentent, les salaires et les retraites doivent suivre !
  • Contrôle des entreprises par les travailleurs et la population, par la levée des secrets bancaire, commercial et industriel.

Les élections passées, ce programme reste d’actualité. Ces mesures doivent être l’objectif des luttes à venir : il faut les populariser aujourd’hui pour les imposer demain.

Reconstruire un parti communiste révolutionnaire

La société capitaliste n’a que l’exploitation et le chômage à offrir aux travailleurs. Il faut que renaisse un parti qui, tout en défendant des objectifs pour les luttes des travailleurs, continue d’affirmer que l’avenir de la société est de se débarrasser de la dictature des capitalistes. C’est un tel parti communiste révolutionnaire que nous voulons construire.

Lutte ouvrière, tract des caravanes LO juillet-août 2012