lundi 7 novembre 2011

:: Les acquis de la Révolution d’Octobre en URSS

Nous examinons la Révolution d’Octobre du point de vue des deux perspectives. 

Du point de vue du développement de la société humaine, le prolétariat n’a pas à renier la Révolution d’Octobre, malgré la dégénérescence et malgré le fait que l’Union Soviétique actuelle n’a pas grand chose à voir ni avec le socialisme ni avec le communisme. Car, même dans son échec, la Révolution d’Octobre a réussi, dans les frontières de l’URSS, des réalisations que n’ont réussi ni le capitalisme libéral dans les pays d’un niveau de développement comparable à celui de la Russie, ni même aucune révolution dirigée par des nationalistes radicaux. 

Media_httpwwwrealussr_jogxpSi, malgré la gabegie de la bureaucratie, l’Union Soviétique a connu un rythme de développement industriel dont le taux fut nettement supérieur pendant plusieurs décennies à ceux de tous les pays du monde capitaliste, c’est grâce à l’économie planifiée résultant de l’expropriation de la bourgeoisie et aussi grâce au caractère radical, au caractère de classe de cette expropriation. 
 
Le prolétariat russe au pouvoir a accepté de composer pendant un temps, sur le plan économique, avec la bourgeoisie mais en ne cessant jamais de la contrôler. Et lorsqu’il a été amené à exproprier cette bourgeoisie, il a pu le faire de façon radicale, mettant ainsi l’intégralité des richesses et des moyens accumulés par les classes privilégiées russes au service du développement du pays. 
Ce développement économique dans le cadre d’un seul pays n’était certainement pas l’objectif des bolchéviks pour qui il était évident que seule une économie unifiée à l’échelle du monde, sans frontière, sans barrière, sans monnaies différentes et, bien entendu, sans les classes parasites qui vivent sur tout cela, pouvait permettre aux forces productives de la société humaine à faire un nouveau bond. 
 
Mais il n’y a pas que l’aspect quantitatif du développement. Pendant la période de l’après-guerre où l’économie capitaliste a retrouvé une sorte de seconde souffle, les investissements impérialistes avaient développé la production dans un certain nombre de pays sous-développés, quoique toujours à un rythme moindre que l’Union Soviétique. Mais si, sous l’aiguillon des inves-tissements impérialistes un pays comme le Brésil par exemple, comparable à l’Union Soviétique à bien des égards, s’est dans une certaine mesure développé, ce développement a un tout autre caractère. 
Le Brésil s’est peut-être doté d’un certain nombre d’entreprises sans équivalent dans la Russie des Soviets. Mais, de Rio de Janeiro à Saô Paulo, les favelas ont poussé encore plus vite que les buildings ! Ce qu’il y a eu comme développement industriel est allé de pair avec le développement de la misère et pour reprendre une expression qui dit bien ce qu’elle veut dire : le développement du sous-développement. 
 
Les investissements impérialistes n’obéissent qu’à la seule logique du profit. Et cette logique prend, dans les pays pauvres, un caractère parti-culièrement brutal. Elle ne diminue pas, elle accentue les inégalités, entre les classes sociales comme entre les régions. Le développement de la région de Saô Paolo par exemple, outre la misère qu’il a accumulé autour de cette métropole industrielle, a confiné le Nordeste ou l’Amazonie dans l’arriération, en donnant à cette arriération un caractère encore aggravé. Pareil en Inde, pareil dans tous ces pays asiatiques où les sociétés impérialistes ont investi, pour profiter de la main d’oeuvre bon marché, pour créer des entreprises ouvertes sur le marché mondial, mais sans s’intégrer le moins du monde dans l’économie locale. 
L’industrialisation de l’Union Soviétique, s’appuyant sur les moyens procurés par l’expropriation radicale de la bourgeoisie, bien qu’elle fut exécutée pour l’essentiel à l’ère stalinienne, avec les méthodes brutales du dictateur, n’a cependant pas obéi aux lois de la recherche du profit avec toutes ses tares indélébiles. Au moment d’Octobre, non seulement la Russie était un pays sous-développé, mais l’État russe tenait sous son contrôle de vastes régions, de véritables colonies, dont certaines vivaient encore dans des structures économiques et sociales du Moyen-Age et dont d’autres en étaient à peine au-delà de l’âge de pierre. 
 
L’Union Soviétique d’aujourd’hui n’a pas seulement hérité du tsarisme la Russie d’Europe, les régions relativement développées des confins occidentaux ou encore les régions relativement favorisées du Caucase, mais aussi les vastes étendues sibériennes aux populations vivant d’une économie primitive ou un certain nombre d’émirats ou de khanats de l’Asie Centrale, parmi les plus rétrogrades de leur époque. 
 
Eh bien, le développement industriel de l’Union Soviétique n’a pas accentué les décalages mais, au contraire, il les a considérablement diminués. 
 
Et puis, il y a le simple fait que les multitudes de peuples et d’ethnies aient pu coexister et maintenir unie l’entité territoriale la plus vaste de la planète. 
 
Oh ! Ce n’est pas la révolution prolétarienne qui a réuni ensemble ces mosaïques de peuples qu’est l’URSS : c’est le tsarisme. Et ce n’est pas dans l’enthousiasme d’une révolution, mais sous l’oppression d’un empire vermoulu. Très exactement comme d’autres empires tout aussi vermoulus de l’époque, comme la monarchie austro-hongroise ou la Turquie, ont réuni sous leur houlette d’autres mosaïques de peuples. 
 
Mais l’Union Soviétique s’est constituée précisémment au moment où ces autres empires s’écroulaient ! 
 
Malgré la politique de mépris grand-russe et d’oppression nationale pratiquée par Staline à l’égard de ces peuples, l’URSS n’a pas éclaté en de multiples morceaux. 
 
Malgré l’appui militaire des États impérialistes et leurs promesses d’aider les nations qui se seraient détachées de l’URSS, rien n’y a fait. Malgré les épreuves de la guerre civile et malgré les exactions de la bureaucratie stalinienne, les peuples qui avaient été entraînés par la tourmente révolutionnaire de 1917 et éveillés à une nouvelle vie et une nouvelle dignité sont restés fidèles à l’État ouvrier, malgré toutes ses tares bureaucratiques. Les liens créés par la révolution entre les peuples de l’ancien empire tsariste se sont révélés jusqu’à présent plus solides que tout le reste. 
 
La comparaison est à cet égard significative entre ce qu’a été capable de réaliser le prolétariat révolutionnaire, et ce que la bourgeoisie sénile de l’ère impérialiste n’est plus capable de réaliser nulle part. L’Europe capitaliste crève d’autant plus de ses frontières que son économie est plus développée, plus interdépendante que ne l’étaient les différentes parties de ce qui allait devenir l’Union Soviétique. Mais les bourgeoisies des pays européens, avec leurs égoïsmes nationaux, avec leur besoin de se cramponner à leurs États nationaux pour s’assurer contre la concurrence du voisin, rèvent à voix haute d’une Europe unie depuis plusieurs décennies. Non seulement elles ne l’ont pas réalisée, mais au moment même où le prolétariat unifiait les peuples de l’Union Soviétique, la bourgeoisie, par l’intermédiaire du traité de Versailles, a dépecé encore un peu plus le vieux continent. 
 
L’oppression de la bureaucratie - pas nécessairement celle qui s’exerce spécifiquement sur le terrain national, car du point de vue des libertés et des droits, le composant russe de la population n’est guère mieux loti - a compromis bien des fois dans le passé cette coexistence entre peuples. L’opposition dans les minorités nationales à la dictature de la bureaucratie a déjà emprunté dans le passé, et pourait emprunter dans l’avenir, le canal du nationalisme. C’est bien pourquoi toute politique révolutionnaire prolétarienne en Union Soviétique devrait reconnaître à chaque peuple de l’URSS le droit à la séparation - tout en indiquant que la seule véritable solution c’est le maintien de l’union des peuples, mais débarassés de la bureaucratie. 
 
En tout cas, soixante-dix ans après Octobre l9l7, le maintien d’un vaste ensemble cohérent, débarrassé de l’exploitation des bourgeois, est un des acquis essentiels de la Révolution prolétarienne.

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